Franchement, qui se doutait que Techland ranimerait un jour Kyle Crane ? Après avoir clos son arc narratif dans le Dying Light original, puis recentré la suite sur de nouveaux visages dans Stay Human, l’annonce de Dying Light: The Beast est tombée comme un couperet – pour les fans, comme pour le studio. Initialement conçu comme simple extension, le projet a récemment été converti en stand-alone, à 60 €. Un virage à haut risque, entre promesses de renouveau et craintes de recyclage.
Le passage du statut de DLC à celui de « jeu complet » n’est pas nouveau dans l’industrie. Ubisoft l’a tenté avec Far Cry New Dawn, Naughty Dog avec Uncharted: The Lost Legacy. Souvent, l’opération frôle l’opportunisme marketing. Mais chez Techland, les développeurs estiment avoir un véritable argument narratif. “On avait gardé des idées sur Crane, son destin brisé et sa soif de vengeance”, confie Karolina Rusin, narrative director. “Le transformer en mi-homme, mi-zombie nous permet d’explorer la fragilité humaine sous un angle inédit.”
Pourtant, le pari reste délicat. Le premier teaser évoquait davantage un DLC centré sur l’action radicale. Le projet s’est étoffé après des retours internes : quête annexes, nouveau scénario, mécaniques de progression inédites. Mais Techland doit maintenant justifier son tarif face à une fanbase aguerrie.
L’idée de base est simple : après treize ans de captivité, Crane s’évade d’un laboratoire militaire où l’on expérimentait des souches virales. À mi-chemin entre l’humain et la bête, il rejoint Castor Woods, un décor alpin infesté de “hunters” – soldats d’élite protégeant un mystérieux Baron. Ce pitch sonne plus mature, presque inspiré par The Last of Us pour son portrait psychologique, ou Prototype pour la dualité entre forme humaine et monstrueuse.
“Le cœur du récit, c’est l’identité fracturée de Crane” – Karolina Rusin, narrative director
Les dialogues se promettent plus fouillés, avec des flashbacks sur Harran et des figures familières (on parle même d’une apparition de Rais). Mais gare au coup de Trafalgar : si on retrouve trop d’archétypes (scientifique fou, baron vengeur, villageois parano), l’effet plateau se fera sentir. Techland assure avoir retravaillé son moteur de dialogue pour des choix moraux plus nuancés : rester humain implique de protéger des survivants ; céder à la bête offre des capacités destructrices, mais fragilise le mental de Crane.
Là où le concept devient intéressant, c’est dans l’intégration de la “bête” à la progression. Techland décrit un système à trois piliers : transformation volontaire, phases d’infiltration et bursts d’action frénétique. Selon le creative lead Pawel Kitajewski, “vous pourrez plonger dans la peau de la bête pour franchir des obstacles, briser des barricades, mais au prix d’une visibilité réduite et d’un niveau de menace accru.”
Cette dichotomie rappelle Vampyr ou Resident Evil 4 dans son équilibre entre force brute et vulnérabilité. Reste à voir si ces phases seront organiques dans l’exploration ou cantonnées à des scripts. Lors d’une démo fermée, certains testeurs ont signalé une trop grande facilité pour passer d’une forme à l’autre, réduisant l’intérêt tactique.
Techland brandit le spectre des Alpes suisses pour vendre un terrain de jeu plus vertical et varié qu’Harran ou Villedor. Forêts denses, falaises escarpées, ruines gothiques et villages isolés : Castor Woods se veut “vivant”, même à l’heure de pointe des morts-vivants. Le studio assure qu’il a revu son level design pour limiter les zones mortes et introduit des biomes distincts avec leurs propres mécaniques (neige glissante, temples inondés, mines abandonnées).
À l’instar de Horizon Forbidden West, l’exploration devrait récompenser la curiosité : caches d’armes artisanales, journaux audio, quêtes annexes rythment l’immersion. Mais la crainte d’une carte trop remplie de marqueurs reste présente. Un joueur de la bêta interne avoue : “À force d’indications, on perd ce sentiment d’épreuve solitaire. J’espère que Techland osera réduire les waypoint.”
La coopération jusqu’à quatre persos a toujours été un atout pour Dying Light. Vous pouvez partager le butin, les upgrades, les missions. Mais dans Stay Human, certains groupes se sont soudés pour franchir les zones à échelle réduite sans effort, vidant toute tension. Pour palier cela, Techland promet :
Ce dernier point, clairement inspiré par Dead Island 2, pourrait relancer l’intérêt en multijoueur. Mais s’il n’est pas équilibré, le risque freinera l’adhésion, notamment pour les joueurs solo qui craindront de ne rien pouvoir faire sans équipe.
Au lancement, trois éditions : standard à 60 €, deluxe à 70 € (rajout de skins, boîtes de ressources), et Ultime (incluant tous les DLC de Dying Light 2). Si les cosmétiques (tenue « Poids lourd », arbalète ornementale) plairont aux collectionneurs, ils ne suffiront pas à justifier le tarif pour les non-initiés.
Plus préoccupant : une boutique in-game a été évoquée lors d’une conférence interne, réservée à du contenu purement cosmétique. Rassurant sur le fond, tant que Techland n’insère pas de microtransactions impactant le gameplay. Pour l’heure, pas de Season Pass annoncé, mais le studio laisse la porte ouverte à des extensions thématiques (hiver, jungle, urbain). À surveiller : la quantité et la qualité de ces futures zones.
Le retour de Kyle Crane, brisé et bestial, fait vibrer la fibre nostalgique. Le gameplay hybride, s’il est bien intégré, pourrait donner un souffle neuf à la franchise et dépasser les précédents spin-offs. Mais la ligne est fine entre innovation et recyclage. À 60 €, il faudra un contenu dense, une narration solide et un level design inspiré pour convaincre.
Positif : intrigue plus sombre, gameplay humain/bête, open world alpin, coop PvPvE innovant. À surveiller : scripts envahissants, niveau de difficulté, durée de vie et équilibre coop.
Rendez-vous le 22 août, manette en main, pour juger si The Beast s’impose comme un vrai renouveau ou reste un DLC surfacturé.
Feature | Specification |
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Publisher | Techland |
Release Date | 22 août 2024 |
Genres | Action, Survival Horror, Open World, Parkour |
Platforms | PC, PS5, Xbox Series X/S |